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L'EVOLUTION DES TEXTES... LE RAP

Comment définir le RAP ?


La façon dont l'auditeur voyage aujourd'hui dans sa tête n'est plus la même qu'autrefois. Hier, des chansons du style Ma cabane au Canada, Parlez-moi d'amour ou Le temps des cerises étaient des chansons sur l'observation de la vie et employaient des mots simples. Elles avaient un point en commun, celui de s'évader du quotidien, de faire oublier pendant quelques minutes la difficulté de la vie. La chanson était une respiration mais elle n'était pas la justification d'une fuite en avant. Dans la carrière d'auteurs contestataires comme Jean Ferrat, Georges Brassens ou Léo Ferré, il y a toujours eu des chansons aux messages puissants et d'autres plus légères, mais sans être "fleur bleue". La force principale de ces grands auteurs de la chanson française a été la capacité d'écrire au moins une chanson dans laquelle nous pouvons, vous et moi, nous identifier.

A l'époque, la musique était souvent le faire-valoir du texte. Ce dernier devait avoir une couleur "populaire" tout en apportant sa raison d'être par des vers d'une certaine profondeur voire d'une certaine intelligence basée avant tout sur l'observation. Mais à l'apparition des chansons anglo-saxonnes, dans les années 1950/1960, tout a été bousculé. La frontière du langage, masquant pour le plus grand nombre la légèreté de certains textes, souvent ridicules, et l'apparition de nouveaux rythmes outre-atlantique a précipité l'équilibre "texte/musique" dans un profond bouleversement qui mettra à mal de nombreux auteurs interprètes de l'époque... Jacques Brel en tête.

C'était comme une vague déferlante que rien ne pouvait arrêter. C'était le début de la consommation de masse. Il fallait s'adapter ou laisser sa place à quelqu'un d'autre. Si certains sont arrivés à résister, ils le doivent avant tout à leurs carrières déjà prestigieuses et par un certain nombre d'auditeurs qui voyait dans la chanson anglo-saxonne un danger immédiat. Pour l'artiste qui démarrait, c'était dur. Résister aux modes de l'époque, le rock, le twist, le jerk… devenait un parcours du combattant. Cette recherche d'identité d'une nouvelle chanson spécifiquement française perdurera jusqu'au années 1980.

Aujourd'hui, la chanson française traditionnelle est rentrée dans une forme de patrimoine orgueilleux. Pour protéger une certaine culture typiquement française, des quotas ont été mis en place en ce qui concerne les médias et cela fonctionne plutôt bien. Les auteurs et compositeurs portant ces valeurs ne manquent pas et continuent à renouveler une certaine tradition culturelle.

Le message du rappeur : porté par le malaise de la société actuelle et pour perdurer la tradition des chansons engagées, de jeunes auteurs continuent d'utiliser les arguments sociaux, les messages politiques pour tenter d'apporter une certaine originalité dans leurs textes. Dans le "rap" qui n'est évidement pas de la musique, l'emploi d'un nouveau vocabulaire, pas toujours compréhensible par tout le monde, sauf à avoir le texte sous les yeux ou faire partie d'un groupuscule sans avenir, participe de façon active au rythme musical, épousant celui-ci jusqu'à ce fondre en lui. Le texte n'est plus détaché de la musique comme dans les chansons d'autrefois, il gomme tous ce qui à fait que la musique éxiste. Il est difficile de savoir qui influe sur l'autre, la musique ou le texte.

Dans ce style, le rôle du couplet/refrain s'est évaporé pour laisser place à un long monologue hypnotique et chiant. Le poids de chaque phrase n'est plus porteur d'images fortes comme autrefois. Le texte devient comme le déroulement d'une pièce théâtrale, racontant une histoire où l'auditeur peut s'identifier dans sa misère.

Peut-on alors parler encore de chansons, puisque les fondements, les marques de repères des structures traditionnelles n'existent plus ? Bien sûr, les textes sont toujours là, mais leurs rôles et leurs importances ont changé. Le refrain qui tenait hier en quelques vers se résume aujourd'hui à un slogan vindicatif. La "chanson/bonheur" n'est plus à l'ordre du jour. Celles-ci se font de plus en plus rare et il est difficile d'imaginer "l'auditeur lambda" chanter un slogan sous sa douche !